QUAND LA RUE JOUE LES ACTRICES – Article complet

QUAND LA RUE JOUE LES ACTRICES

Cette année, la rue est à l’honneur pour le 21eme Festival de cinéma en plein air de La Villette. Une occasion de retrouver la vision unique de cinéastes qui choisissent les villes et leurs artères pour leur âme plus que pour leur décor.

Tour à tour angoissante, stimulante ou accueillante, la rue inspire les personnages ou les piège, elle les soutient ou les confronte au réel. Simple témoin ou accompagnatrice active, elle crée un décor vivant indissociable de certains chefs d’oeuvre du cinéma.

Taxi Driver ou la confrontation au réel .

Il pleut sur New York, un taxi de nuit arpente les rues glauques des pires quartiers de la Grosse Pomme. Prostituées, pervers, assassins en puissance, la vision nocturne de Travis, interprété à la perfection par le jeune De Niro, trace de la rue un portrait méprisable. Elle représente pour lui ce qu’il y a de plus abject. A l’abri de son taxi, le héros la refuse, la hait, elle devient son combat. En cherchant à libérer la société de sa vermine, il en devient paradoxalement le pire représentant. Scorsese filme la ville dans ce qu’elle a de plus sombre, sous le regard subjectif d’un héros en marge, incapable d’y trouver sa place.


Un témoin inquiétant.

Dans Quai des orfèvres, la rue devient le témoin angoissant des allées et venues des personnages. Lors d’une nuit tragique durant laquelle un crime va être commis, elle représente insidieusement un danger pour ses auteurs présumés. Clouzot, directeur d’acteurs hors pair, sait lui faire dire ce qu’il veut. En la filmant toute en ombres et en pavés, elle habille l’intrigue d’un voile oppressant et plonge dans la tourmente ceux qui tentent de lui échapper.

Humaine et solidaire.

Cédric Klapisch va plus loin dans Chacun cherche son chat : la recherche d’un chat perdu va mettre en branle les habitants d’un quartier de Paris, servant de prétexte à le filmer sous tous les angles. De passages en ruelles, de places en carrefours, le 11eme arrondissement endosse le rôle principal du long métrage. Le réalisateur ne nous épargne ni les travaux de destruction, ni leur bruit qui fait office de fond sonore alternatif à la B.O. Mais de jour comme de nuit, c’est la solidarité des habitants qui prédomine au-delà des petites mesquineries. Il se dégage finalement de la rue une humanité réconfortante dans laquelle l’héroïne va puiser toutes ses ressources.

La ville symbole.

Qu’ont en commun Woody Allen, Nanni Moretti, ou Almodovar ? Il savent si bien filmer « leur » ville et ce qui s’y passe qu’on a l’impression de la connaître aussi bien qu’eux. New York, Madrid, Rome, Paris, certaines cités ont un caractère tel qu’elles deviennent partie prenante des œuvres, elles servent l’histoire en tant qu’elles-même, en apportant juste leur atmosphère. Ainsi Nanni Moretti sur sa vespa nous offre-t-il une balade dans la Rome ensoleillée et truculente de son Journal Intime. A travers le regard qu’Almodovar porte sur Madrid dans Tout sur ma mère, l’on retrouve la vie fourmillante, chaleureuse, ou décalée de la capitale espagnole, les travestis battent le pavé, les junkies dealent, les destins se nouent et se dénouent au rythme du cœur madrilène. Woody Allen enfin, dont la quasi totalité de la filmographie se déroule à New York, nous offre encore avecManhattan,une preuve de son attachement immodéré pour sa ville.

Une ouverture sur le monde.

A travers toutes ces visions, toutes ces histoires urbaines, le programme de cette année vous embarquera pour un fabuleux voyage autour de la planète. Si New York ou Paris sont particulièrement mises à l’honneur à travers de grands classiques, ne manquez pas de découvrir Tokyo dans le film éponyme Tokyo !, Amsterdam et Wuppertal avec Wim Wenders dans Alice dans les villes, Portland, la Chine, l’Argentine… A moindres frais, bien installé sur votre plaid ou votre transat, ce cinéma gratuit à ciel ouvert vous propose de nombreuses escapades dans les avenues, rues et ruelles des quatre coins du globe, toutes différentes, toutes uniques. Rendez-vous le 19 juillet pour le grand départ !